Dérivant, par chance ou destinée, jabordais Pihaena
Les magnifiques créatures
Toutes les magnifiques créatures
.
Nageant, tournoyant, tournant, se cachant, jouant
.
Là dans leau noire de ce lagon du Pacifique Sud.
Jeus peur.
De grandes ombres apparaissaient dans le lointain obscur.
Ma lampe de poche éclairait seulement un mince faisceau du grand
espace.
Les vers dansant dans leau me donnèrent la chair de poule.
Je savais certains poissons venimeux,
Comme le petit rouge ondulant toutes épines dehors.
Jessayais de ne toucher à rien,
Alors quavec mes yeux, je cherchais à tout absorber.
Soudain jentendis des voix,
appelant
Dangéliques voix denfants appelant
Appelant dau dessus..
Dau dessus du plafond de mercure miroitant
Cétaient les enfants sur le quai.
Ils me demandèrent, en français, ce que je faisais.
Je leur répondis que je regardais la vie.
Et, ayant un peu froid après deux heures dans leau,
Je vins sur la plage et rencontrais les gens du lagon de Pihaena.
Je vis leurs pancartes,
Jappris leurs légendes et leur style de vie,
Jai mangé leur nourriture,
Reçu avec reconnaissance leurs soins et médicaments,
Et de même jai partagé les miens avec eux,
Jai vécu avec eux dans leur camp et leurs maisons.
Ils vivent le cur sur la main.
Ils mont raconté comment, il y a
longtemps, dautres vinrent dans leur pays
Et demandèrent
" A qui est cette terre ? "
Et puis : " Où est votre acte notarié ? "
Et bientôt des actes notariés furent écrits
par ces autres,
Et les gens découvrirent quils navaient des titres
que sur une très petite portion
De ce qui avait été leur.
Ceci est une histoire souvent répétée autour du globe.
Aujourdhui, encore, cela recommence. Encore.
Ce lagon était vie et amour pour les
générations passées.
Ces gens découvrent aujourdhui que ces autres,
Avec leurs montagnes de papier et leurs actes notariés,
Ont encore une fois pris leur simple droit, sacré et sans
papier, à la propriété.
Tout ceci avec laide d'un gouvernement supposé protéger les intérêts de tous Ha !
Que ce poème soit leur acte notarié.
Un cri de lâme qui dit :
" Ceci est mon cur. Ne le piétinez pas. "
Charles Olson
Mars 2000
Traduit par Christa TEIHOTU